Aurélie et Gweltaz ont acheté une maison autoconstruite en bois et paille deux ans plus tôt. Ils l’ont améliorée pour s’approcher des performances passives. VMC double flux et chauffe-eau solaire ont fait chuter les factures et grimper le confort !
De tels logements ne courent pas les vitrines des agences immobilières. Bioclimatique, alimentée en eau de pluie, chauffée pour une poignée de bûches, bâtie en bois et isolée en bottes de paille ; Aurélie et Gweltaz achètent en 2016 cette maison autoconstruite dans un quartier de Vitré (35). Le descriptif a beau être idyllique, ils découvrent quelques lacunes et décident de pousser ses performances.
« Les murs en paille avec finition bois ou chaux étant perspirants, certains pensent qu’on peut se passer de ventilation. La vapeur d’eau migre à travers la paroi, mais les polluants, eux, ne sont pas évacués. Composés organiques volatils (COV) des peintures, formaldéhydes des colles », cite Gweltaz en toquant contre le plan de travail de la cuisine qui « en dégage pendant deux ou trois ans ». Conseiller info-énergie(1), il apporte un appareil de mesures du taux de particules fines, de dioxyde de carbone (CO2), de COV et d’humidité.
« Un logement ne devrait pas dépasser 800 parties par million (ppm). Ici, on ne descendait jamais sous 900 ppm. Avec des invités, on a vite grimpé à 1 600 ppm. Chacun expire du CO2, porte des vêtements, du parfum… Le temps d’y rentrer une bûche, le poêle dégage du monoxyde de carbone, du benzène, du NOx. Le taux est monté à 2 500 ppm. Le lendemain, on était à 1 100 ppm… »
Les travers de la qualité de l’air
Fortement aérées avant le coucher, les chambres atteignent 600 ppm. Mais au matin : 900 ppm. « Chacun dégage 50 cl de vapeur par nuit et le CO2 stagne dans une pièce non ventilée. » Seule solution : ouvrir les fenêtres. Mais pour un bon renouvellement d’air, « il faut ventiler 10 min toutes les 2 h. En hiver, tu ne le fais pas ; l’air est alors plus pollué à l’intérieur qu’à l’extérieur ».
Une ventilation mécanique s’impose. « On trouvait dommage d’installer une VMC simple flux qui ferait entrer de l’air froid, obligeant à consommer plus de chauffage. » La famille opte pour une double-flux. Au lieu d’aspirer l’air extérieur par des ouvertures ménagées dans les fenêtres en extrayant l’air intérieur depuis les pièces humides, la double-flux comprend un échangeur dans lequel l’air aspiré dehors croise l’air extrait dont il récupère une partie de la chaleur avant d’être soufflé dans les pièces. « Hier soir, il faisait 9,5°C dehors et elle soufflait à 21°C. Ce matin, elle aspirait de l’air à 4,5°C et nous le restituait à 19,5°C. Pas besoin d’allumer le chauffage, alors que nos voisins le font depuis trois semaines ! »
Après l’installation de la VMC, le moniteur de qualité de l’air repointe le bout de son nez électronique. Les chambres ne montent jamais au-delà de 600 ppm le matin. Le séjour ne dépasse plus 900 ppm à dix autour d’une raclette. Le débit maximal est alors enclenché avant de repasser en vitesse 2 la soirée terminée. « En temps normal, on reste autour de 450-550 ppm. »
Éviter de surchauffer en été
Tandis qu’une VMC premier prix « n’est pas réglable et fait un vacarme monstre », ce modèle laisse à peine percevoir un léger filet d’air en tendant l’oreille. Mais « la nuit, je me focalisais sur le petit sifflement de la bouche alors qu’Aurélie n’entendait rien », se souvient Gweltaz. Il contacte le SAV du fabricant, qui vient réduire le débit de la vitesse 1 de 100 à 85 m3/h, anéantissant cette gène. La famille apprécie la régulation automatique de sa VMC, avec réglages horaires enregistrés selon les saisons et jours de la semaine. En été, le débit augmente la nuit pour rafraîchir le bâti et un by-pass s’ouvre pour que l’air entrant ne soit pas réchauffé.
La gestion de la chaleur estivale a dû être améliorée. Les baies vitrées plein sud sont surmontées de brise-soleil, mais un « jour » laisse parfois entrer un flux lumineux. Le couple plante de la vigne de part et d’autre des ouvertures. « En attendant qu’elle grimpe sur le support et se répande sur les brise-soleil, des voiles d’ombrage empêchent toute surchauffe au rez-de-chaussée. » D’imposantes fenêtres « servent de radiateurs » à l’étage, qui monte à 29°C. En attendant des brise-soleil, les volets sont fermés autant que possible et des films anti-UV miroirs sont posés. Les 30 cm d’ouate soufflés dans les combles s’étant tassés à 27-28 cm, la famille profite de l’opération « combles à 1 € » pour ajouter 30 cm. « L’été suivant, on avait 2°C de moins ! »
Deux mois de réflexion avant l’installation
Installer une ventilation double-flux dans un bâti existant n’est pas évident. Deux mois de réflexion pour déterminer où placer les gaines et le caisson. Le couple prend ensuite une semaine de vacances pour réaliser l’installation. Congés bien rentabilisés : « Au travail, j’ai récemment étudié le devis d’un artisan pour la fourniture et pose de la même machine, chiffré à 8 000 € », confie Gweltaz, qui a déboursé moins de 5 000 €.
« On entend beaucoup qu’en rénovation, le manque d’étanchéité à l’air empêche d’installer une double-flux, pointe Harold Monnier. Au contraire, la simple-flux “ tire ” l’air extérieur en mettant la maison en dépression, ce qui amplifie les fuites et ne garantit pas un bon renouvellement d’air. En mécanisant à la fois le soufflage et l’extraction, la double-flux met la maison en équilibre, réduisant les flux parasites. C’est pour ça que depuis 2020, elle bénéficie des aides publiques Ma Prime rénov’. »
Bâti existant, la VMC doit s’adapter
Ici, le caisson prend la place d’une des deux penderies de l’entrée. « Je pensais profiter du passage des réseaux eau et électricité, mais il n’y avait pas la place d’ajouter cinq gaines de 90 mm », se souvient Gweltaz, qui a dû agrandir le coffrage. Reste à traverser le plancher, dont une solive se situe juste sous le placard de la salle de bains condamné pour accueillir les gaines de l’étage. « J’ai dû en passer deux d’un côté et trois de l’autre, donc réaliser deux trous et deux coffrages. »
Le mur extérieur est percé à la tronçonneuse électrique après l’échec de la scie sabre et de la scie égoïne. « La densité de la paille m’a surpris ! On l’a retirée par l’intérieur en s’arrêtant au ras de l’enduit extérieur. » Des trous sont créés à la perceuse par dehors en suivant le patron des gaines, avant d’extraire délicatement ces ronds de chaux avec marteau et burin. La cavité est rebouchée avec un mélange terre-paille et des chutes d’isolant bourrés autour des gaines isolées. Un mastic acrylique entre gaines et enduit rétablit l’étanchéité. Enfin, les entrées d’air anticipées dans les menuiseries pour une éventuelle simple-flux sont comblées par un adhésif d’étanchéité à l’air.
Factures divisées par deux ou trois
« Les chambres n’ayant pas de chauffage dédié étaient à 15-16°C le matin. Maintenant, la double-flux y souffle de l’air à 18-19°C, se réjouit Gweltaz. Il suffit d’un peu de soleil, d’une tarte au four, que les filles courent – on dégage 1 W par kg – et la double-flux suffit à chauffer la maison. Ordinateur, chauffe-eau, toutes les calories générées sont valorisées. »
Le poêle consomme moitié moins de bois qu’avant ! « Notre VMC nécessite en moyenne 18 W, soit 23,4 € par an. C’est peu comparé à tout le chauffage économisé, même si on compte 29 € deux fois par an pour changer les filtres. Une simple-flux, qui consomme à peu près 10 W, ne coûte que 10 € d’électricité en moins par an et fait entrer du froid. » Ajouté aux 80 € de bûches, « notre chauffage coûte au maximum 161 €/an », avec les services additionnels rendus par la VMC (confort d’été, qualité de l’air).
On est passé de 350 € à 100-120 € par an pour chauffer l’eau
Pour réduire encore les consommations, le chauffe-eau électrique revendu 250 € est remplacé par un système solaire thermique. Les tuyaux reliant les panneaux solaires au ballon sont descendus depuis le bas du toit par le vide de 10 cm dans les murs entre paille et plaques de plâtre, découpées en haut de paroi pour les attraper et les faire rejoindre le coffrage du réseau de VMC. Bien pratique ici, ce vide « crée toutefois une résonance. Il faudrait y injecter de la ouate ». Au nord, les murs pleins en bottes de paille directement enduites créent au contraire « une acoustique très douce ».
L’appoint électrique du chauffe-eau n’a jamais été utilisé de mi-mars à fin octobre 2020. L’appareil est paramétré pour que seuls les capteurs solaires soient sollicités en journée. À 17 h l’hiver, si le soleil n’a pas suffi, la régulation déclenche l’appoint pour monter à 58°C et l’arrête à 21 h. « On est passé de 350 €/an d’électricité pour chauffer l’eau à 100-120 €. On avait estimé 80 €, mais les enfants prennent des bains et on a raccordé le lave-vaisselle directement à l’eau chaude pour qu’il ne sollicite pas sa résistance, qui représente 80 % de sa consommation électrique. Le comportement joue aussi. Beaucoup de choses que je faisais avant à l’eau froide, je les fais désormais à l’eau chaude car elle paraît gratuite alors que, selon la période, ce n’est pas toujours le soleil qui la chauffe. »
Reportage et photos de Gwendal Le Ménahèze, La Maison Ecologique n°121